Seydi El Hadj Malick SY (1855 – 1922)

« De toutes les belles et bonnes choses, Seydi Hadj Malick SY a apporté le meilleur ». L’institution du bourde précédant le Maouloud en constitue une parfaite illustration. Ce témoignage de son héritier et plus grand disciple, le vénéré Khalifa Ababacar SY (Qu’Allah les agrée) résume toute la philosophie de l’action du Sage. Seydi El Hadj Malick SY est en effet un ascète de l’excellence au plan spirituel, intellectuel, moral et social, un champion de la foi et de la vertu.

Théologien, mystique, jurisconsulte, moraliste, historien, El Hadj Malick SY est un esprit universel qui a dominé son époque à tout point de vue et a été salué par toute sa génération comme l’exemple vivant de la sounna en raison de sa connaissance des sciences religieuses et son respect scrupuleux des prescriptions islamiques, de son ascétisme allié à une ouverture sur son milieu, de son érudition stupéfiante qu’il a su communiquer à ses disciples à travers le pays. Il était un formateur-éducateur méthodique qui a enseigné le savoir et le savoir-vivre, réputé pour son élégance et son éloquence dans le style, la parole et le geste.

C’est le fondateur de l’Ecole de Tivaouane et formateur de la première génération des oulémas et mouqadams qui se sont répandus dans les quatre coins du pays et ont promu la belle image de leur prestigieuse école d’appartenance par la formation, la construction de mosquées et la création de dahiras oeuvrant pour une solidarité effective entre musulmans.

Des sagesses de Seydi Hadj Malick SY, on retiendra notamment celle-ci qui corrobore toute la philosophie de son action : « s’il m’était donné de redevenir jeune, j’apprendrais à connaître la société car souvent l’on y perd sa religion sans savoir où la chercher ». Apprendre à connaître la société, c’est apprendre à connaître le pouvoir, ses prérogatives et ses limites, les droits des uns et des autres mais aussi les devoirs de l’homme vis-à-vis de toutes les créatures de Dieu qui peuplent la société.

El Hadj Malick SY était très soucieux de l’unité des coeurs sur la base de principes qui transcendent les races, les langues et les ethnies. Ne disait-il pas : « si le wolof fonctionnait selon le modèle associatif fondé sur l’adhésion volontaire, je m’en serai retiré » ou encore « ma maison ne répond pas du nom de Sy mais du nom de Dieu ; je peux être le père d’un enfant né à Koulikoro (province du Mali à l’époque considérée une contrée très lointaine) et n’avoir aucune relation avec mon enfant biologique ».

Par conséquent la seule parenté qui avait de l’importance à ses yeux était celle fondée sur le partage des principes communs inspirés de l’Islam et la volonté de se conformer à ces principes. Même lorsqu’il enseignait le mariage célébré selon l’Islam, il mettait l’accent sur la nécessité pour les deux mariés d’honorer leurs deux Gendres que sont Allah et Son Messager (PSL), le mariage étant célébré selon leurs Très Hautes Volontés.

Seydi Hadj Malick SY faisait preuve d’humilité doublée d’une rare probité intellectuelle et a procuré à ses disciples une formation qui jure avec le fanatisme. Il disait : « Je vous ai enseigné et appliqué devant vous tout ce qu’Allah a dit dans le Coran, le Prophète dans ses hadiths et Cheikh Ahmed Tidjane dans sa tariqa. Si quelqu’un après moi venait vous enseigner le contraire, dites lui avec politesse: « Nous préférons nous en tenir aux enseignements de notre maître. Même si je revenais de moi-même vous professer le contraire, priez pour moi et dites vous que c’est Satan qui vous est apparu sous mon image » ».

Cette humilité affichée au plan scientifique se prolongeait sur le plan social et religieux. A ceux qui voulaient voir en lui un saint, à la suite de ses interprétations inspirées des textes sacrés, il s’évertuait à leur démontrer que leur stupéfaction est infondée en leur montrant la source où il a puisé ses propos. L’on raconte qu’un savant mauritanien en visite au Sénégal l’ayant longuement observé parmi ses disciples ne put s’empêcher de lui dire : « Vous êtes un saint messager ? ». Il lui répondit : « Je ne sais quoi mais je sais que je suis envoyé à ces gens-là ». C’est ainsi que tous ses écrits révélent un souci méticuleux de simplification et de clarification mais aussi de mise à proximité et à la disposition de ses enseignés, la substance des ouvrages difficiles d’accès qu’il avait le privilège d’acquérir. Il eut ainsi recours à la poésie comme instrument didactique se disant qu’il est plus facile de retenir la science en chantant des poèmes qu’en retenant des idées écrites en prose.

Au plan social, l’humilité doit être de mise dans les relations parents-enfants de même que le sens de la mesure pour qu’il y ait équilibre entre le spirituel et les exigences de la société, entre le souci du bien-être individuel et les exigences du bien-être familial. En témoignent les recommandations de Seydi El Hadj Malick SY à un de ses disciples qui le quittait après son éducation auprès de lui : « Fais tout pour que trois aspects de caractère ne compromettent pas l’exécution de trois de tes obligations : primo, ne te montre pas imbu de ta personnalité jusqu’à ce que tes parents finissent par te craindre ; secundo, ne te montre pas préoccupé jusqu’à ne plus avoir de temps pour accomplir les cinq prières rituelles ; tertio, ne te montre pas avare au point que ta famille en fasse les frais ».

Extraits traduits des enseignements en arabe et en wolof, sur l’islam et la tariqa tidjaniya, du guide spirituel Serigne El Hadj Madior CISSE, responsable de la dahira Moutahabina Fillahi et disciple de Khalifa Ababacar SY (RTA).