L’ablution majeure (ghousl ou bain rituel)

L’ablution est ici considérée comme majeure par comparaison au ndiapp (woudhoû) considérée comme ablution mineure). Elle est considérée comme majeure en ce sens qu’elle permet de retrouver l’état de pureté après la survenance d’une cause d’impureté majeure. Elle trouve son fondement et sa légitimité dans les textes sacrés de l’Islam. Dans le Saint Coran, il est révélé : « Ô les croyants ! N’approchez pas de la Salaat (prière) … quand vous êtes en état d’impureté majeure jusqu’à ce que vous ayez pris un bain rituel » (Sourate An-Nisâ, verset 43) ; « et si vous êtes pollués (djounoub), alors purifiez-vous (par un bain » (Sourate Al-Mâ-Idah, verset 6). Dans un hadith rapporté par Ahmad et Malick selon des formules différentes, le Prophète (PSL) a dit : « Lorsque la circoncision entre en contact avec la circoncision, le bain rituel devient obligatoire pour l’homme et la femme qui ont entretenu des relations intimes avec pénétration (à l’exclusion du simple flirt) même s’il n’y a pas eu éjaculation. Comme on l’a souligné en son temps, il faut reconnaître le contexte dans lequel ce hadith a été formulé pour en comprendre la signification. En effet, l’excision était une pratique courante en Arabie et l’Islam n’avait pas pris position vis-à-vis d’elle. Loin de confirmer l’excision, ce hadith illustrait tout simplement la manière pudique du Messager d’Allah de définir le coït en usant des expressions comprises de tous dans la société de l’époque : « contact entre l’organe circoncis de l’homme et l’organe circoncis de la femme ». Selon les oulémas, on ne peut tirer de ce hadith plus que cette raison didactique fondée sur la pudeur.
Cela étant, la dimension purificatrice de l’ablution est aux préceptes islamiques. C’est la raison pour laquelle il importe de connaître :

  • les conditions du caractère obligatoire du bain rituel;
  • les actes défendus à la personne en état d’impureté majeure;
  • les éléments obligatoires (fardh ou farata) ;
  • les éléments surérogatoires (sounna) ;
  • les éléments recommandés (mandub ou sôpe) ;
  • les éléments répréhensibles (makrouh ou sîbe) ;
  • les modalités d’accomplissement.

I- Les conditions du caractère obligatoire du bain rituel

Le bain rituel ou ablution majeure (également appelé lotion générale) est obligatoire en cas de survenance d’une des causes suivantes :

  1. Après toute émission de sperme, fut-ce durant le sommeil, ou après disparition d’une sensation voluptueuse, qu’il y ait ou non coït. En revanche, le bain n’est pas obligatoire :
    • avant l’émission de sperme ;
    • s’il n’y a pas eu jouissance ;
    • si l’émission est due à une cause inaccoutumée (par exemple à la suite d’un bain chaud). Dans ce cas, l’ablution mineure (ndiapp) suffit ;
    • au cas où on coïterait, puis on accomplit le bain rituel et ensuite seulement on éjacule. Dans ce cas, on ne recommence pas la prière accomplie après le bain rituel, mais avant l’éjaculation. Si on doute, en voyant une tache, s’il s’agit de liqueur prostatique (mazyou) ou de sperme (maniyou), il faut accomplir le bain rituel et recommencer les prières faites depuis le moment du dernier sommeil. La même solution est retenue si on est sûr qu’il s’agit de sperme mais qu’on ignore le moment de son émission.
  2. Après l’introduction du gland (sâkara ou d’une longueur équivalente de verge en cas d’ablation) d’un individu pubère dans un vagin (fut-ce d’une bête ou d’un cadavre). Le bain est recommandé à qui est proche de puberté et à la fille impubère après des rapports sexuels avec une personne pubère. Toutefois, il est à remarquer que le bain n’est pas obligatoire pour la femme si du sperme a pénétré, sans coït, dans son vagin, encore qu’elle en eut éprouvé de la jouissance.
  3. Après les règles et lochies : en effet, l’écoulement du sang menstruel ou à la suite de couches met la femme dans une situation d’impureté l’obligeant à se purifier en accomplissant le bain rituel après son retour à l’état de pureté : « Ne les approchez que quand elles sont pures. Quand elles se sont purifiées, alors cohabitez avec elles suivant les prescriptions d’Allah car Allah aime ceux qui se repentent, Il aime ceux qui se purifient » (Sourate Al-Baqarah, verset 222).
  4. La conversion à l’islam : le bain rituel est obligatoire pour l’infidèle converti après le prononcé de la profession de foi (shahâda). Mais il reste valable s’il a été accompli avant la shahâda si la personne s’était déjà décidée pour l’Islam.

II- Les actes interdits à la personne en état d’impureté majeure

En cas de survenance d’une des causes d’impureté majeure, le musulman doit accomplir l’ablution majeure. Avant qu’il ne la refasse, il lui est interdit d’accomplir :

  • la prière (salaat) ;
  • la tournée rituelle (tawaaf) ;
  • le contact du Coran, fut-ce au moyen d’une baguette et le port du Coran fut-ce au moyen d’une attache pour le suspendre : « et c’est certainement un Coran noble, dans un Livre bien gardé que seuls les purifiés touchent » (Sourate Al-Waqi’a, versets 77-79). Cependant, le port du Coran est licite au cas de son transport avec d’autres biens qu’on entend transporter. Par ailleurs, l’interdiction ne concerne pas les commentaires du Coran, ni une portion du Coran (hâdje ou diouki), ni les pièces ou bijoux sur lesquels sont gravés des versets coraniques, ni une planchette (âliwa) appartenant au maître ou à l’élève, ni l’amulette contenant du Coran, si elle est dans une gaine ;
  • la récitation du Coran sauf, par exemple un ou quelques versets pour se protéger de Satan (par exemple âyatoul koursiyou, lakhad diâ-akoum etc.) ;
  • l’entrée à la mosquée, encore que ce soit pour la traverser.

III- Les éléments obligatoires (fardh ou farata) du bain rituel

Il s’agit des éléments dont le manquement entraîne l’invalidité de l’ablution majeure ainsi que de la prière accomplie après elle. Il pèse alors sur la personne l’obligation de reprendre le bain rituel et la prière. Sont considérés comme fardh dans l’accomplissement de l’ablution majeure les éléments suivants :

  • l’intention d’accomplir l’ablution car en Islam, il est de principe que « les actions valent en fonction des intentions qui les sous-tendent » (hadith reconnu authentique par consensus) ;
  • la continuité comme dans l’ablution ;
  • le fait de dégager les cheveux et poils et de rassembler à la main les tresses pour que l’eau touche la peau, mais il n’est pas nécessaire de les délier ;
  • le fait de frotter même après aspersion de l’eau avec du linge ou ce qui en tiendra lieu.

IV- Les éléments surérogatoires (sounna) du bain rituel

Sont considérés comme sounna dans l’accomplissement de l’ablution les éléments suivants :

  • l’invocation du Nom d’Allah avant de débuter l’ablution conformément au hadith selon lequel « Pas d’ablution à celui qui n’aura pas invoqué le Nom d’Allah » (Ahmad). Certains auteurs considèrent toutefois cet élément comme méritoire et non comme sounna ;
  • le lavage des deux mains pour commencer ;
  • le rinçage de la bouche en se gargarisant (galakh ndikou) ;
  • l’aspiration de l’eau par les narines (sorakh ndikou) ;
  • le rinçage, sans eau, du conduit des deux oreilles.

V- Le bain rituel recommandé

L’ablution majeure est recommandée :

  1. Le vendredi : d’après un hadith considéré comme authentique par consensus.
  2. Pour entrer en état de sacralisation (ihram) en vue du pélerinage (hajj ou omra).
  3. Pour entrer à la Mecque et pour le stationnement d’Arafat à l’occasion du pélerinage.
  4. A celui qui aura procédé au lavage d’un mort. Un hadith du Prophète (PSL) fait état de la nécessité pour lui d’accomplir le bain rituel.

On recommande en matière de bain rituel :

  1. De commencer par enlever ce qui vous a souillé ;
  2. Puis de passer aux membres en faisant, une seule fois une ablution mineure complète ;
  3. Puis de commencer par laver ce qui est en haut du corps (au-dessus des organes génitaux) avant le bas et ce qui est à votre droite, avant le côté gauche ;
  4. De laver trois fois la tête avec un peu d’eau, prélevée chaque fois sans limites précises ;
  5. De laver les parties sexuelles à la suite de coït et avant de dormir, l’ablution mineure et non l’ablution sèche.

VI- Les éléments répréhensibles (makrouh ou sîbe) du bain rituel

Sont considérés comme répréhensibles les faits suivants :

  1. L’accomplissement du bain rituel dans un endroit souillé (impur) de crainte d’être atteint par des impuretés au moment où l’on cherche à se purifier. En revanche, il est recommandé d’accomplir l’ablution dans un emplacement pur ;
  2. Le gaspillage de l’eau, car le gaspillage en toute chose est prohibé. En revanche, il est recommandé d’utiliser un peu d’eau. Certes, il n’y a pas de limite fixe mais la quantité doit être raisonnablement suffisante sans excès ;
  3. L’accomplissement du bain rituel dans de l’eau stagnante : « Que personne en état d’impureté majeure n’accomplisse son bain rituel dans de l’eau stagnante » a enseigné le Messager d’Allah (PSL) rapporté par Mouslim ;
  4. L’accomplissement du bain rituel dans un endroit découvert (sans abri, ni rideau) : « Certes Allah est très pudique et aime la pudeur ; si quelqu’un d’entre vous doit accomplir le bain rituel, qu’il se couvre » rapporté par Abou Daoud ;
  5. L’accomplissement du bain rituel avec les restes de l’eau précédemment utilisée par une femme pour se purifier.

VII- Les modalités d’accomplissement du bain rituel

Voici présenté l’ordre chronologique des étapes du bain rituel :

  1. Invoquer le Nom d’Allah avec l’intention d’accompir le bain rituel pour sortir de l’état d’impureté majeure ;
  2. Se laver les deux mains pour commencer ;
  3. Enlever ce qui vous a souillé en lavant les parties sexuelles
  4. Passer aux membres en faisant, une seule fois une ablution mineure complète (ndiapp) ;
  5. Laver trois fois la tête avec les oreilles avec un peu d’eau, prélevée chaque fois sans limites précises ;
  6. Commencer par laver ce qui est en haut du corps (au dessus des organes génitaux) avant le bas et ce qui est à votre droite, avant le côté gauche.

Extraits traduits des enseignements en arabe et en wolof, sur l’islam et la tariqa tidjaniya, du guide spirituel Serigne El Hadj Madior CISSE, responsable de la dahira Moutahabina Fillahi et disciple de Khalifa Ababacar SY (RTA).